Chappie

De Neill Blomkamp, j'ai déjà eu l'occasion de chroniquer l'excellent Elysium. Tapant de nouveau dans la SF, qu'il semble apprécier un peu plus qu'un peu, il nous revient ces jours-ci avec ce Chappie qui était précédé d'une jolie bande-annonce...
Résumé : 
Johannesburg est la ville la plus dangereuse au monde. Par chance, les forces de polices reçoivent désormais le secours d'une escouade robotique : des machines humanoïdes, auxiliaires de police aussi efficaces que coriaces, et qui assurent la richesse de l'entreprise d'armements qui les fabrique. Pour Deon, l'informaticien quelque peu geek sur les bords qui les a conçus, le projet le plus motivant se trouve ailleurs : il veut créer la première intelligence artificielle... et lorsqu'un de ses robots policiers se trouve mis au rencart parce que trop endommagé, il y voit une opportunité de tester enfin son programme, quitte à subtiliser un peu de matériel et surtout la clé qui permet de redémarrer le système d'exploitation de ses machines... Mais la naissance de la première intelligence artificielle sera perturbée : kidnappé par un trio de petites frappes, et surtout haï par un rival de Deon pour qui l'existence d'une machine pensante est un blasphème, le robot Chappie devra lutter pour sa propre existence... tout en découvrant la beauté comme la laideur du monde...
On pense bien volontiers à Johnny 5 (Short-Circuit) devant les premières images de ce film. La ressemblance entre les deux oeuvres, quand même séparées par une trentaine d'années, s'arrête pourtant là : le propos de Neill Blomkamp n'est pas du tout celui d'une pochade science-fictive car l'approche de Chappie est bien plus grave que celle de Short-Circuit. Chappie s'éveille à la conscience dans un univers qui lui est incompréhensible : en face de lui se trouvent des êtres qui lui apprennent à parler, dont certains s'appellent "Créateur", "Maman" et "Papa", et qui lui proposent des activités surprenantes, comme la peinture mais aussi le crime. Cet éveil ne se fait pas sans douleurs ni angoisses pour le robot : certains êtres humains ne sont pas bienveillants et n'auront pas de scrupules à l'endommager, voire chercheront même à le démanteler pour ce qu'il est ; par ailleurs, sa vie est limitée dans le temps, pour cause d'une batterie trop peu chargée. C'est alors que Chappie fait son premier choix : celui d'oeuvrer pour sa propre préservation, quitte à rechercher les solutions les plus invraisemblables - et surtout à se tourner, lui aussi, vers la pensée magique.

On trouvera dans ce film un certain nombre d'allusions religieuses : le collègue ennemi de Deon postule que de toute façon le cerveau humain est inégalable et que, de ce fait, la seule existence de l'intelligence artificielle est un blasphème. Or Chappie vit, à sa façon, il apprend - vite - et se montre peut-être plus efficace que l'être humain pour résoudre l'énigme du sens de la vie. Ne fait-il pas preuve d'un respect inné (ou presque) pour les commandements de son créateur ? Ne pardonne-t-il pas à son ennemi, en fin de compte ? Et surtout, ne fait-il pas preuve d'esprit de sacrifice lorsqu'il s'agit de sauver les siens ? Chappie, le film, donne presque le vertige lorsque l'on repense à la profondeur des idées qui s'y nichent. N'en doutons pas : Neill Blomkamp nous parle ici d'humanité plus que d'intelligence artificielle. Pour lui, aucun être ne naît mauvais, toute leçon laisse sa marque... et la post-humanité, somme toute, est pour demain. Tout comme Elysium, il s'agit d'une belle fable : celle de l'avenir sombre, et pourtant ouvert, et pourtant grandiose, qui attend notre espèce à la condition qu'elle ne perde jamais l'espoir.

Commentaires

Escrocgriffe a dit…
Article dans lequel je me retrouve complètement, tu as raison de parler de fable, j'écrivais dans ma propre chronique qu’il s'agissait d’un véritable conte de fée moderne, à mon humble avis… J’ai été touché par certaines séquences. Après District 9 et Elysium, Blomkamp fait très fort, j’attends sa version d’Alien avec impatience !
Anudar a dit…
Certaines séquences étaient en effet très touchantes. Après, petit regret concernant la bande-son peut-être un peu assourdissante... mais ça ne valait pas la peine d'en parler dans la chronique.